OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Saint-Valentin: une pensée solidaire pour les passagers clandestins http://owni.fr/2011/02/14/saint-valentin-une-pensee-solidaire-pour-les-passagers-clandestins/ http://owni.fr/2011/02/14/saint-valentin-une-pensee-solidaire-pour-les-passagers-clandestins/#comments Mon, 14 Feb 2011 09:46:28 +0000 La Peste http://owni.fr/?p=46422

Message d’espoir en cette période de repères bouleversés (on ne peut même plus compter sur la rassurante stabilité des dictatures amies de la Sarkozie, tout fout le camp) : le merchandising de l’amour se porte bien.

Oui, le business du Love For Ever est florissant ; à l’heure où j’écris cet article, ma boîte mail croule sous les rappels de sociétés attentionnées, qui craignent de me voir délaisser ma tendre moitié. On m’informe donc à grand renfort de gifs clignotants et de superlatifs qu’il ne me reste que quelques heures pour faire livrer 50 roses à 20 €, inonder mon mari de parfum viril-et-sexy, acheter une bague, choisir une centrale-vapeur, trouver l’ordinateur portable de mes rêves, et avoir un coup de cœur pour un triple rabbit à 18 vitesses, une tenue d’infirmière salope ou un gode-ceinture. Joyeuse Saint-Valentin mon amour.

Beurk

Alors on est bien d’accord : la Saint-Valentin, c’est la date commerciale par excellence, officiellement gerbante, ringarde, et qu’on ne célèbre qu’au second degré sous peine de passer pour des cons grégaires. On feindra donc de mépriser le concept tout en y souscrivant avec une sarcastique désinvolture (comme ces gens prétendument supérieurs à la masse bêlante qui live-tweetent frénétiquement les émissions de télé-réalité en affectant de prendre ça de très haut. Permettez que je pouffe. Merci). Donc la Saint-Valentin c’est naze. Mais de la même façon qu’il faut avoir du fric pour se permettre le luxe d’affirmer que « l’argent, ce n’est pas important », il faut être en couple ou en célibat désiré pour dire que la Saint-Valentin c’est de la daube.

En effet, si les gens qui subissent le célibat pensent comme tout le monde que cette fête est une ineptie, il n’en reste pas moins qu’un(e) célibataire frustré(e) regrettera parfois de ne pouvoir cracher sur cette célébration de merde, le 14 février lui rappelant cruellement qu’on dédaigne bien plus facilement ce qu’on peut repousser que ce qu’on ne peut atteindre.

Mais ça, c’est du tout-venant : couples méprisants, célibataires faussement désinvoltes… Rien d’inavouable dans ces deux configurations très classiques. Les vrais oubliés de la Saint-Valentin, ce ne sont pas eux, mais les passagers clandestins.

“It’s complicated”. Mais ce n’est pas sale.

Invisibles, se mouvant dans l’ombre, peuplant l’Internet mondial de soupirs d’extase, de battements de cœur affolés, de culottes humides, d’étreintes moites, de souvenirs brûlants, d’attentes incertaines, de rendez-vous manqués et de comptes à rebours trop lents, les passagers clandestins n’ont aucune existence officielle. Ostensiblement impassibles et en refus total de ce puant symbole, ils ne sont pas supposés fêter quoi que ce soit le 14 février. Ou alors pas ensemble. Et jamais officiellement. Et puis ils sont au-dessus de ça. D’ailleurs, ils ne forment pas un couple. Enfin pas tout à fait. Parce que c’est pas pareil. Et, euh, c’est compliqué. Oh-et-puis-cherche-pas-tu-peux-pas-comprendre.

Les filles, les gars, du fond du cœur, joyeuse Saint-Valentin. Et bienvenue dans un monde d’hypocrisie et de silence. Parce que le propre des amours illégitimes, c’est bien le chagrin silencieux. Ce qui, en toute sincérité, est largement plus gerbant que l’exploitation commerciale des sentiments amoureux : en tandem souterrain avec une personne non étiquetable, pas question d’exprimer publiquement quoi que ce soit. L’émotion est, par principe, muselée. Parfois c’est pratique. Mais souvent, c’est frustrant.

Oh, ça va, hein, pas de leçon de morale : que celles et ceux qui n’ont jamais eu envie de se taper une cible interdite me jettent la première boîte de Mon Chéri. Non, le binôme officieux n’est pas toujours un suppôt de Satan, et le dérapage extra-muros n’est pas forcément signe de duplicité préméditée. Simplement, les choses arrivent. Et, euh… parfois elles durent. En dépit de toute logique. J’aimerais donc souhaiter une très bonne Saint-Valentin…

Vous pouvez pas comprendre.

… Aux PQR : le PQR, ou plan Q régulier, n’est pas à proprement parler un “péché” ou une infraction au code conjugal, les deux protagonistes n’étant pas forcément en couple ailleurs. À la base, il s’agit simplement de deux potes qui se mélangent à l’occasion, ayant constaté qu’en plus de leur complicité amicale, une certaine adéquation érotique leur permettait de copuler comme des castors sans pour autant rogner sur les autres aspects préexistants de la relation : se taper un plateau de makis, critiquer ensemble des films pourris, et dire du mal des capitalistes sur le web 2.0. Le PQR, à première vue totalement détendu de la touffe et ne ressemblant en rien au couple classique “parce que tu vois, en fait on n’est pas amoureux, on est amis. Simplement, on baise, quoi”, peut parfois déraper et nimber le plateau de makis d’un halo sirupeux, mêlant sentiments profonds, intensité sensuelle et questions sans réponse. Alexandre Silenus en parle très bien ici. Mais une chose est sûre : pas de bouquets de roses pour ces deux-là. Ça nuirait au décorum et ça ferait peuple.

… Aux couples mariés. Enfin pas ensemble : eux, ils sont plutôt dans la merde en fait. Quoi, l’adultère c’est le Mal ? Oui, ok, si vous voulez… Enfin dans l’absolu, ce serait sympa de pas trop la ramener, vu que les grands principes survivent rarement aux circonstances. Et dans la vraie vie, il n’est pas si simple de décréter que la dévorante passion qui pousse le plus honnête des conjoints à se tordre de plaisir dans des bras non autorisés est signe de désamour pour le/la partenaire officiel(le). Parce que, comme je le disais, it’s complicated, tu comprends. Dans tous les cas, il est déjà très difficile de réintégrer le lit conjugal sans avoir l’impression d’avoir une lettre écarlate gravée sur le front : inutile de compliquer les choses en ayant à justifier la provenance d’un pendentif / d’un bouquet de fleurs / d’une culotte en soie. Pas de Saint-Valentin pour eux, donc. Et puis ils n’ont “pas besoin de ça”.

… Aux fucking-friends dont l’un seulement est marié : configuration problématique par excellence, qui génère une injustifiable jalousie. De fait, lorsque dans la relation clandestine, l’un des deux seulement est marié, l’autre est toujours officiellement sur le marché. Et le simple fait de l’entendre se décrire comme “célibataire” peut entraîner des pulsions meurtrières chez celui ou celle qui est en couple. C’est mesquin. Mais c’est vrai. Donc, l’autre est célibataire. Libre. Disponible. Et gravement consommable (sinon on ne se le/la taperait pas). Sans qu’on ne puisse le lui reprocher. Impossible de revendiquer quoi que ce soit, impossible de combler ce déséquilibre inhérent au deal initial, et impossible de se défaire de cette constante épée de Damoclès, celle du risque-de-la-vraie-rencontre. Quand le fucking friend est célibataire, le/la partenaire marié(e) se sent aussi indispensable qu’une poussée d’herpès génital. Par conséquent, le 14 février, on se tait dignement. Pas la peine de se ridiculiser encore plus.

À tous ces passagers clandestins, qui ne sont pas des couples, je souhaite donc une bonne Saint-Valentin, sans roses, sans bijoux, sans lingerie fine et sans mots doux, parce que ce qu’ils vivent vaut tout autant d’être célébré que les bêlements institutionnels des couples légitimes.

Je leur souhaite aussi de parvenir à gérer sans trop de casse l’éventuelle chute finale, la rupture-qui-n’est-pas-une-vraie-rupture-parce-qu’on-n’était-pas-un-couple, ou le gros malentendu bien moisi qui viendra mettre un terme à leur histoire parce qu’à force d’additionner les silences dans ces relations où l’on est supposé “pouvoir tout se dire”, le dialogue devient très vite un terrain miné, interdisant le moindre aveu et condamnant chaque faiblesse.

Je leur souhaite également d’apprendre à mentir comme des chefs pour leur propre confort, histoire de ne pas avoir à subir le jugement bas-de-plafond d’une société où malgré les godes en vente libre et le mot “sexe” en requête Google star, il est encore très difficile de s’écarter de la norme conjugale autrement que de façon temporaire, provisoire et subie. Hors mariage, hors enfant, hors couple classique, pas de salut durable. Quel dommage.

>> Images CC Flickr Peiyu Liu Biscarotte et D.A.K.Photography

Retrouvez notre dossier et la photo de Une de Marion Kotlarski, CC pour OWNI :

]]> http://owni.fr/2011/02/14/saint-valentin-une-pensee-solidaire-pour-les-passagers-clandestins/feed/ 10 Geek underground: une fabuleuse expérience de “sexualité augmentée” http://owni.fr/2010/11/20/le-geek-underground-une-fabuleuse-experience-de-sexualite-augmentee/ http://owni.fr/2010/11/20/le-geek-underground-une-fabuleuse-experience-de-sexualite-augmentee/#comments Sat, 20 Nov 2010 14:00:52 +0000 La Peste http://owni.fr/?p=35288 Dans la catégorie “analysons le web et rationalisons l’homo numericus”, les mœurs sexuelles du geek constituent une inépuisable source de rédactionnel facile : le geek, cet être étrange venu d’ailleurs, semble en effet inspirer les pisse-copie 2.0, dont je fais humblement partie (ceci expliquera peut-être que j’aie un jour entrepris de donner aux geeks un mode d’emploi du clitoris).

Le geek mainstream : orgasme et mozzarella au programme.

Étant admis que le geek n’est pas vraiment un être humain mais pas tout à fait un alien, nous autres loleurs du web nous appliquons à exploiter le filon et produisons sans scrupules de la vanne geekesque au kilomètre, les geeks eux-mêmes contribuant à propager les clichés (preuve d’un savoureux sens de l’autodérision). C’est ainsi que l’internaute lambda en est venu à considérer le geek, dans son acception commune, comme un individu un peu asocial, gamer invétéré capable de jouer en réseau des nuits entières, se nourrissant exclusivement de pizzas et de Coca même pas Zéro, plutôt timide mais passionné, et doté d’un tempérament de feu.

Oui, le geek est supposé baiser comme un Dieu, tout empli qu’il est de cette bienfaisante frustration sexuelle générée par des heures semaines mois de réclusion volontaire. En gros, une femelle un peu agile et capable de s’extasier vaguement sur Asimov ou de mouiller sa culotte devant une Xbox a de grandes chances de choper sans se fatiguer du geek consentant et dévoué.
Mais tout ça ne représente qu’une version expurgée des choses. Et la description peu flatteuse d’un ado attardé fusionnant avec sa manette n’est jamais qu’une caricature du geek mainstream, dont les spécificités restent totalement accessibles, même pour le grand public : facile à comprendre, facile à choper.

Il faut donc creuser soigneusement le sujet pour découvrir le côté obscur de la geekitude, à savoir un autre genre de geek, plus discret, en retrait des réseaux sociaux, vivant le web à sa façon et ignorant superbement l’existence du Pizza Hut le plus proche. Un peu plus âgé que son homologue mainstream, un peu plus diplômé, et bien plus cérébré, c’est le geek underground. Une pépite. Un diamant brut. Là où le geek mainstream met de la fougue en pagaille, le geek underground distillera un érotisme raffiné. Et puissant. Le cul avec un geek underground, c’est l’expérimentation d’une réalité (sexuelle) augmentée.

Eh oui, le concept de réalité augmentée se décline à l’infini. Et les notions qui le sous-tendent sont parfaitement transposables, y compris au sexe. Il y a quelques jours, Éric Scherer nous parlait bien de “journalisme augmenté“… Et dans le deuxième point abordé, il évoquait le fait de “lâcher prise sur ses contenus et laisser les contenus extérieurs entrer”. Ooooh mais je suis tout à fait d’accord, Eric. Rien de tel que de laisser entrer des contenus extérieurs. Surtout s’il s’agit de ceux du geek underground, un homme à même d’augmenter la sexualité en décuplant nos facultés de perception proprioceptives. Comment fait-il ? C’est très simple : sur le schéma classique d’une partie de baise ordinaire, il implémente un système permettant de superposer l’intelligence au sexe. Et là, on obtient du vrai cul en 3D, en une alchimie qui n’a plus rien de virtuel.

Le geek underground est donc capable non seulement d’irriguer en simultané son cerveau et sa queue, mais il considère en outre ces deux organes comme des zones érogènes équivalentes.
Ceci dit, s’il nous ouvre la voie vers une sexualité augmentée, il est moins facile à apprivoiser que le geek mainstream. Normal : son fonctionnement est plus complexe. Et l’homme est un peu sauvage. En gros, il se mérite. Portrait d’un spécimen d’exception.

Le geek underground n’aime pas le web 2.0. Et ça, c’est hot.

Facebook le débecte. Twitter le navre. MySpace est une incarnation du Diable, en la personne de Murdoch, cette innommable raclure. Contrairement au geek mainstream qui est un pur produit de l’internet social, le geek underground a une conscience aiguë des ressorts les plus subtils de l’exploitation commerciale des données personnelles de l’utilisateur. À juste titre, il y est donc fortement opposé. Et son argumentation ne se résume pas à un poing levé contre le Grand Capital, loin de là ! Une solide documentation vient appuyer son point de vue.

Une femme capable d’envisager froidement la portée économique des ressorts du web 2.0 et de soutenir une discussion hargneuse sur le fonctionnement discutable des pure players, par exemple (et si possible en se faisant l’avocat du diable, proférant des énormités du style : “Non mais sans déconner, LePost et Rue89, c’est quand même une formidable aventure humaine, c’est pas vraiment une histoire de fric !“) a donc de fortes chances de finir la soirée épinglée sur le canapé, avec l’ourlet de sa jupe qui lui chatouille les oreilles.

Certes, ça demande un peu plus d’implication personnelle que la pose soigneuse d’un mascara pailleté ou le visionnage de l’intégrale de Big Bang Theory, mais en terme de retour sur investissement, c’est carrément plus rentable : la prestation du geek underground est inversement proportionnelle à l’intensité de son aversion pour le web 2.0. Il maîtrise donc aussi bien le cunnilingus que le sacro-saint principe du no free lunch. Alors oui à l’orgasme augmenté (d’une touche de conflit idéologique).

Le geek underground ne joue pas. Il code.

Chez lui, pas de console. Et dans son PC, pas de carte graphique super cosmique. Il s’en cogne, il ne joue pas. Pour se détendre, le soir après le boulot, il se consacre à des projets personnels militants. Et qu’on ne s’y trompe pas : s’il adhère volontiers au slogan de Wordpress (“Code is poetry”), il méprise un peu ces ersatz de CMS tout juste bons à faire de l’internaute un branleur sous assistance respiratoire php. Pour lui, si à 30 ans t’es pas sous SPIP, t’as un peu raté ta vie.

D’ailleurs, les développeurs SPIP sont la référence absolue. Bien sûr, pour passer sous SPIP il faut mettre les mains dans le cambouis, mais une blogueuse qui souhaiterait s’envoyer un geek underground aurait tout intérêt à ne pas trop se vanter de maîtriser Wordpress, et à lâcher cet outil de grosse feignasse pour rejoindre la grande famille SPIP. Car pour faire bander un geek underground, il ne suffit pas de le comprendre : il faut montrer ce qu’on sait faire. Mais pas de panique : si la perspective de dézipper SPIP est trop angoissante (ça peut rebuter, à froid, même si au final ce n’est pas plus compliqué que Wordpress), il est possible d’opter pour l’observation participante en se contentant d’admirer l’homme à l’œuvre, à condition bien sûr d’être suffisamment renseignée pour piger de quoi il parle, histoire de rebondir sans se vautrer.

Tu veux que je pianote sur ton clavier ?

En effet, SPIP étant le minimum syndical et constituant le prérequis de toute geekerie militante, notre geek voit plus loin, et donne vie à sa propre conception du réseau social de niche. Et là, c’est forcément chez Elgg que ça se passe… Elgg, l’outil open source permettant de créer un réseau sur mesure.

Alors si l’on candidate pour une séance de baise augmentée, comprendre le fonctionnement d’Elgg et savoir poser des questions pertinentes peut s’avérer profitable à deux niveaux : tout d’abord, la maîtrise du sujet créé une communauté d’intérêts extrêmement bandante. Ensuite, la réponse aux questions posées permettra d’apprécier à sa juste valeur le fonctionnement cérébral du geek underground.

À titre de symbole, il serait donc utile :
- de pouvoir comparer avec lui l’intérêt des deux packs Elgg (le core engine ou le pack complet) selon qu’il souhaite se lancer dans du développement vraiment particulier ou au contraire se contenter de piocher dans les community plugins pour agrémenter le réseau de base
- de savoir que The Wire constitue le Twitter interne d’Elgg
- de piger qu’une des grandes forces d’Elgg, dans le cadre d’un réseau social affranchi de l’exploitation commerciale des données personnelles, c’est de permettre l’hébergement du code sur son propre système
- de savoir se montrer indulgente face aux problèmes typiques rencontrés par un concept pas encore très bien rôdé (et là, c’est le moment de placer l’expression “compatibilité ascendante”).

Au-delà de ça, et de façon plus globale, être capable d’encaisser des critiques au sujet d’un bout de code “pas propre”, et de comprendre pourquoi, ça peut toujours servir.

Alors d’accord, tout ça demande du souffle et empiète sur le temps normalement consacré à se faire un gommage. Mais se donner cette peine, c’est mettre son cerveau au service de son cul : et ça, c’est un formidable service à se rendre. Bienvenue dans un monde d’érotisme augmenté (d’une communion des âmes dans une plateforme intègre).

Le geek underground ne râle pas. Il milite.

Par petites touches, sans ostentation, et avec une grande cohérence au quotidien, il s’engage. Exemples significatifs :

- Du Coca Zéro ? Cette boisson de geek abruti et de pétasse frivole ? Il n’y en a pas chez lui. Parce que Coca-Cola assassine des syndicalistes colombiens. Et le docu réalisé par German Gutierrez et Carmen Garcia valide son point de vue. Du coup, mieux vaut ouvrir une bonne bouteille de bordeaux.
- Les liens ouvrants ? C’est le Mal, expliquera-t-il. Pourquoi ? Mais parce que Jakob Nielsen, gourou du web, l’a dit un jour. Dans une de ses alertbox. Le 30 mai 1999, précisément. Le lien ouvrant, c’est la négation de liberté de l’internaute, ça provoque la perte de l’historique, bref c’est un manquement à l’éthique implicite de tout webmaster qui se respecte. Merde quoi. (Conseil de survie : si l’on se trouve sur le site d’un geek underground et qu’on s’apprête à cliquer sur un lien hypertexte, mieux vaut cliquer sur la molette centrale de la souris. Voilà. Comme ça, on ne perd pas la page initiale. Ce qui est le souhait de tout individu normal.)
- Le commerce équitable ? Oui, mais pas n’importe comment. À l’opposé des bobos stupides qui bouffent du quinoa en se la pétant écolo sans penser une seconde aux litres de kérosène nécessaires à l’importation de cette herbacée d’Amérique du Sud, le geek underground réfléchit et achète intelligemment sa musique (oui, il est souvent punk), ses bouquins (non, il ne lit pas de la daube), et même son café.

Proudly powered by Elgg.

- La lecture sur le web ? Pourquoi pas… Mais de la bonne, alors, pas du contenu frelaté. On trouvera donc dans ses flux le rézo, le blog de Jean-Pierre Martin, celui de Tristan Nitot, Les Nouvelles News, sans oublier Brave Patrie et d’autres sites de qualité.

Globalement, la tranquille conviction avec laquelle il défend son steak rend le geek underground encore plus désirable : loin des grandes gueules à pancarte qu’on n’entend militer que lors des manifs annuelles ou de l’autarcie décérébrée des gamers en manque de chatte, il est solidement ancré dans la réalité, et fait preuve d’une crédibilité que rien ne vient entacher.

Et au pieu, il est comme dans la vie : crédible, solidement documenté et totalement impliqué. La levrette augmentée (d’une pointe d’html ou de contestation sociale), c’est un délice insoupçonné.

Le geek underground : l’essayer c’est l’adopter.

Au final, ce geek un peu à part est une valeur sûre, trop souvent méconnue. Il serait utile de commercialiser un logiciel permettant, selon les principes mêmes de la réalité augmentée, d’intégrer virtuellement le geek underground dans notre lit, histoire de se faire une idée précise de la prestation.

Ce que j’en pense à titre personnel ? Je valide totalement ce spécimen de mâle. Je le recommande, même.

Mais en attendant, mes blogs personnels sont toujours sous Wordpress, je tweete quotidiennement, j’ai descendu un litre de Coca Zéro en écrivant cet article, et tous les liens que j’y ai insérés sont ouvrants. Faut croire que je ne suis pas une bonne recrue.

Images CC Flickr César S.., mac steve, Fonzie’s cousin et adpowers

Une CC Rosekipik

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http://owni.fr/2010/11/20/le-geek-underground-une-fabuleuse-experience-de-sexualite-augmentee/feed/ 200
Les journalistes, c’est rien que des faux blogueurs, na! http://owni.fr/2010/06/06/les-journalistes-c%e2%80%99est-rien-que-des-faux-blogueurs-na/ http://owni.fr/2010/06/06/les-journalistes-c%e2%80%99est-rien-que-des-faux-blogueurs-na/#comments Sun, 06 Jun 2010 19:16:43 +0000 La Peste http://owni.fr/?p=17603 Dites, les vieux blogueurs racornis de la sidebar, vous vous souvenez comment c’était hype de beugler sur le classement Wikio, en 2008 ? La blogo underground faisait genre « on le méprise », et la blogo trendy faisait genre « c’est trop bien ». Au final, bien sûr, tout le monde a pu s’exprimer pour faire son intelligent en prononçant le mot magique : « algorithme ». (En fait, il suffisait d’aller lire Jean Véronis et d’apprendre par coeur ses deux billets, dans lesquels il nous éclairait sur comment le soleil sortait tous les matins du trou du cul de Wikio).

Mais chacun jouait dans sa propre cour, et jamais on ne lançait le ballon chez Les Zautres. Des fois qu’on se fasse taper.

Ben ouais : d’un côté t’avais les blogs Zinfluents, et de l’autre les blogs Zinflués. Et puis en transversal, pour décorer, t’avais les blogs Zinclassables. Tout ce petit monde se balançait joyeusement à la tronche des valeurs Zessentielles, et chacun finissait par se calmer en continuant à bloguer sur les sujets de son choix.

Ça fonctionnait vachement bien. De temps en temps éclatait une bonne petite guerre blogosphérique, histoire de pas non plus s’endormir sur ses billets ; soit dans le registre « mon gloss est plus beau que le tien, pouffiasse », soit dans le registre « Ségo était plus légitime que Nico, connard ». Bien sûr, en 2009 le débat s’est élevé d’un cran avec le fight « Scrapbooking vs point de croix », les blogs de loisirs créatifs ayant totalement bouleversé l’écosytème virtuel en place.

Bouh le billet sponsorisé

Ensuite, t’as eu la polémique du billet sponsorisé. Ça, c’était sympa également. Ça fightait sévère. Les seuls à fermer leur gueule, au final, c’était les blogueurs qui, avec leurs 200 ou 500 euros mensuels de billets sponsos, arrivaient à boucler leurs fins de mois (pas tellement glorieuses pour cause d’Assedics récalcitrants et d’employeurs peu enclins à conclure). En gros, au royaume des putes borgnes les riches aveugles étaient rois, et le billet sponso c’était le Mal.

Mais pour finir, le snobisme, le vrai, s’est installé au sein de la blogosphère. Un parfait reflet de notre société-qu’a-rien-que-des-problèmes. Zinfluents et Zinflués se tinrent  donc la main pour édifier en chœur la nouvelle hiérarchie 2.0. Et c’est ainsi que naquit le Bien et le Mal blogosphérique, divisant les blogs en deux catégories bien distinctes : les blogs Zintelligents et les blogs Zidiots.

Depuis ce jour-là, ça rigole plus : ou t’en es ou t’en es pas. T’as pas fait Sciences Po, tu ne repenses pas l’Internet Mondial à chaque billet, tu ne nourris pas le monde affamé de ton omniscience culturo-ouèbesque ? Tu n’analyses pas la crise de la presse papier, tu ne l’opposes pas avec virulence au rédactionnel web, tu n’as jamais pondu de billet sur le pourquoi du comment des difficultés rencontrées par les modèles économiques dits émergents ? Tu ne sais pas disserter sur les implications du personal branding, tu es incapable de soutenir une discussion en ligne sur les enjeux du nouveau journalisme, et les billets de Narvic te plongent, hébété(e) de stupeur, dans un coma proche de la NDE ? Si tu as répondu oui à au moins une de ces questions (oui, une suffit, la blogo c’est cruel, mon lapin), c’est que ton blog fait partie des blogs Zidiots. Tu n’as point de consistance, point d’existence virtuelle parmi les gens qui comptent, et s’il te prenait l’envie de commenter sous un billet, chez un blogueur Zintelligent, sois gentil, ne tache pas le background du taulier en laissant l’adresse de ton blog. Dis plutôt que t’as bac + 4, ça t’aidera peut-être. De toute façon, personne te répondra, t’en es pas.

Zinflués et Zinfluents, Zidiots et Zintelligents (se lit dans les deux sens).

Nan mais pleure pas, t’as certainement d’autres qualités hein. Mais bon, t’as un blog Zidiot, voilà, quoi, qu’est-ce que tu veux que je te dise. Au moins, dis-toi qu’il est pas rose-chiottes comme le mien, c’est toujours ça de pris. Ah, si, il est rose ? Bon. Euh… Pense à autre chose, va. Et si ça peut te rassurer, sache que ton lectorat est plus Zintelligent que le lectorat des blogs Zintelligents : chez toi, on atteint jamais le point Godwin ; ben oui, t’as déjà distribué un point Godwin dans un fil de commentaires consacré à un fond de teint ou à la maille serrée, toi ? Non. Alors réjouis-toi. Parce que le point Godwin dans les commentaires, c’est jamais rien que des gens suffisamment vrillés du bulbe pour se foutre en rage devant un clavier et un écran, et instiller dans des affrontements désincarnés des forces vives qu’ils feraient mieux de mettre au service de choses plus concrètes (communiquer IRL avec la même fougue, par exemple). Le mec qui passe des heures sous un billet pour finir par traiter un inconnu aussi con que lui de nazi, sérieux, je trouve ça pathétique.

Enfin tout ça, c’était super quand même.

Jusqu’au jour où le Ouèbe Puant et Pontifiant a grondé d’une nouvelle indignation. Une nouvelle polémique, une bien juteuse : les blogueurs, c’est pas des vrais journalistes.

Les poissons, c’est pas des vrais légumes

Ça, c’était superbe : bon, évidemment, ça revenait à peu près à dire que les poissons, c’est pas des vrais légumes, mais c’est pas grave, ça marchait  bien, comme base de conflit. Et de la même façon que les gens peuvent avoir du mal à piger que la différence entre le canoë et le kayak c’est pas le type d’embarcation mais la discipline sportive pratiquée, quelle que soit la coquille dans laquelle on pose son cul, ben les gens ils ont pas pigé que le journalisme est une activité professionnelle reposant sur des compétences précises, n’ayant que très peu à voir avec l’installation d’un Wordpress (bon, les gars qui roulent pour Dotclear, vous fâchez pas. De toute façon, tant que vous êtes pas passés sous SPIP, votre existence ne vaut rien). Du coup, tu peux tenir un blog ET faire du journalisme. Ce sont deux choses différentes, deux activités reposant sur des principes de fonctionnement, formel et structurel, différents.

Bref, il était de bon ton de fonder son raisonnement sur le support utilisé, sans considérer l’activité exercée. Une fois le truc décortiqué, on ne retenait qu’une chose : le journalisme et les blogs, c’était un peu comme le rouge corail et le rose nacré : vu de loin, ça se ressemble un peu, mais sérieux, ça va pas ensemble du tout. Et rares sont ceux qui ont su dépasser ce clivage.

Partant de là, on aurait pu croire que la Messe était dite.

Mais la blogo est une mine d’or, et tous les jours une pépite en sort.  Alors accroche-toi à la colonne latérale, tu vas halluciner. Donc on est bien d’accord que les blogueurs, c’est pas des vrais journalistes.

EH BEN FIGURE-TOI QUE LES JOURNALISTES, C’EST PAS DES VRAIS BLOGUEURS.

Ouais.

Rien que ça.

Ça te la ramollit, pas vrai ?

C’est un truc de fou en fait : paraît qu’il y a des journalistes /chroniqueurs qui se sont mis en tête d’ouvrir un blog. Et d’y proposer des trucs. Et puis attention, les mecs c’est des fourbes hein, ils se sont carrément pas gênés, ils ont tout fait comme les vrais blogueurs, à savoir réfléchir à un chouette thème pour donner de la gueule à leur blog, travailler le wording pour que le rubriquage claque bien, agencer leurs petits machins sur la colonne latérale, bref  les mecs ils ont vraiment mis la gomme pour se faire plaisir. « Ouaiiis, s’tu veux, moi j’ai un blog, là, tu voiiiis ». C’est méchant, le journaliste. Ça trompe son monde. Et le chroniqueur, m’en parle pas, il est encore pire…

Mais tu sais ce que c’est, le pire du pire ? Attends, tu vas pleurer : le journaliste-faux-blogueur, il est dans le classement wikio. Et ça, sérieux, ça pue, pour le blogueur-puriste. Bon, faut savoir que pour le blogueur-puriste, de toute façon, tout est potentiellement puant. Mais Wikio, bordel ! Où va-t-on !

Alors je te la refais pas en technicolor, mais si tu veux, tu peux reprendre le paragraphe précédent en remplaçant « journaliste » par « homme politique », ça marche aussi  : parce que oui, y a aussi des personnalités politiques qui ouvrent des blogs. Et donc les personnalités politiques, c’est pas des vrais blogueurs non plus. Parce que chez eux, le blog c’est de la vitrine, mise en place avec du pognon. Donc le contenu personnel, bof. Y en a pas vraiment.

Ces usurpateurs ne jouent pas le jeu du lien sortant

Et là où le blogueur-puriste s’insurge, c’est que tous ces usurpateurs blogosphériques viennent poser leur cul sur son coin de web, et ne jouent pas le jeu du lien sortant. Le sacro-saint lien sortant. Pour le blogueur-puriste, le vrai blogueur fait du lien sortant, tandis que le faux blogueur n’est pas de son monde, n’adopte pas ses pratiques, ses usages. Le vrai blogueur fait une blogroll, le faux non. Le vrai blogueur produit du contenu, le faux insère des vidéos. Bref, pour le blogueur-puriste, le faux-blogueur « c’est pas des gens comme nous ».

Donc là, je soupire. Parce qu’il y a des jours où la connerie me fatigue. Et très sincèrement, je pense qu’avec ce genre de discours à la con, le blogueur ne prouve qu’une seule chose : il est capable d’être aussi corporatiste qu’un Joffrin au mieux de sa forme, aussi hargneux que Mélenchon dans ses grands jours, bref il a gagné sa place au sommet du système qu’il dénonce.

Blogueur-puriste, sois fier de toi : tu peux te montrer aussi con que ceux dont tu voudrais être l’égal, et dont tu t’es toujours cru supérieur. Parce que tu reproches aux journalistes et aux politiques de te regarder de haut, mais sans rire, tu t’es vu ?

Rappel : tout le monde a le droit d’ouvrir un blog

Un peu de sérieux. Tout le monde a droit d’ouvrir un blog. Et d’en faire exactement ce qu’il veut. Et d’être classé chez Wikio, même sur la base d’un algorithme prenant en compte les liens sortants. Ou pas. Ça a peut-être changé depuis. Je m’en tape. Dans tous les cas, l’autorité frelatée du classement Wikio est indigne de l’intégrité revendiquée par les blogueurs politiques. Voir un blogueur politique pleurnicher sur la présence dans la blogosphère, et pourquoi pas au Wikio, de journalistes-usurpateurs ou de politiques-VRP, c’est aussi dénué de sens qu’un végétarien t’expliquant que ton T-Bone sera bien meilleur saignant, et qu’en carbonisant ta viande tu le déçois beaucoup.

Chacun adopte sur son blog le fonctionnement qui lui convient. Les blogs vitrines des politiques ? Ils ne sont pas pires que les blogs vitrines des marques. Et alors ? Alors rien. On s’en fout. Ça ne changera rien à l’impact des blogs à contenu.

Quant aux journalistes et chroniqueurs à blog, je ne vois pas où est le problème. Ils ne font pas de blogroll ? Et puis ? Qui a dit que c’était obligatoire ? Les usages ? Les pratiques ? La blogosphère se serait-elle sclérosée au point de consacrer des « pratiques » à la con, tout ça pour entrer dans un classement à la con ?

Le blog, c’est l’envie, le désir, une petite extension virtuelle d’un pan de notre vie : convictions politiques, émotions, récits, partage de contenu, démarche de personal branding, oui, même ça (ce n’est pas sale), vente de pin’s ou propagande anti-gloss. Le blog, il est exactement ce qu’on en fait. Et on est libre d’en faire ce qu’on veut. On n’est pas obligé de « jouer le jeu ». Le blog, c’est notre propre terrain de jeux. Alors oui, Nicolas fait beaucoup de liens sortants, et Guy l’épicier pas tellement, sur son blog actuel. Mais Nicolas et Guy l’épicier sont l’un et l’autre très détendus du slip, bien sympathiques et leur contenu est intéressant. Nicolas explique d’ailleurs avec pertinence pourquoi la présence de certains blogs politiques au classement Wikio l’interpelle. Pour autant, il ne sombre pas dans l’aigreur. Ni dans le snobisme. La preuve, il me parle. C’est dire s’il a les idées larges.

Alors les arguments du type « ce n’est pas notre monde », au secours…

Je vous toise du haut de mon rose-chiottes

C’est pourquoi mon blog rose-chiottes et moi-même décidons ce soir, en vertu du pouvoir que nous nous conférons, en vertu également de cette époque où le classement wikio nous avait léché le cul, de nous revendiquer aussi fréquentables, militants, intelligents et cultivés que le blog politique le plus militant, Zintelligent et cultivé. Et en plus, dans le genre militante, ça va, je me défends.

Et pis c'est tout.

Par ailleurs, toujours en vertu du pouvoir que je me confère, et considérant qu’avec mon bac + 4 et demi et les compétences qui me permettent de gagner ma vie via la rédaction de formidables articles ayant trait à la sexualité, je me déclare officiellement fausse blogueuse.

Du coup, lorsque j’ai publié ce billet sur mon blog personnel, j’ai viré ma blogroll, toisé tout le monde du haut de mon rose-chiottes, et décrété arbitrairement qu’étant maîtresse en ma demeure, y aurait pas de commentaires  sous ce billet (ouais, je fais ça parfois, notamment quand j’ai pas envie que les lecteurs s’expriment sous la musique de merde que je mets en ligne).  De toute façon, comme j’avais raison, tout échange ou discussion via les commentaires me semblait inutile. Tu noteras à quel point je respecte pas les pratiques sacrées de la blogo : non seulement je piétine le lien sortant, mais en plus je refuse de jouer le jeu des commentaires. Ce que ça prouve ? Une seule chose :  chez moi, je fais ce que je veux. Et j’affirme que même sans lien sortant et sans commentaires, c’est bien un blog que je tiens. Et  j’emmerde les usages de la blogosphère. Politique ou non.

Comme Guy l’épicier, je fais ce que je veux de mes cheveux sur mon blog. Et j’adore ça.

Et comme Nicolas, je partage mon avis.

Mais bien sûr, chez les autres je sais me tenir, et je m’adapte. Du coup, sur Owni, tu as le droit de commenter.

Edit du 5 juin : je te conseille de faire un saut à l’épicerie du coin (comment ça, c’est un lien sortant ?) (T’es sûr ?) (Ah ouais, tiens)

Billet initialement publié sur Le Journal d’une peste sous le titre “Les journalistes, c’est rien que des faux blogueurs, il paraît. Et Wikio il est méchant.”

; images CC Flickr Stéfan, Okinawa Soba (In Asia and Africa until August), markuz

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